Vous avez dit QHSE ? Un sigle de 4 lettres (Qualité, Hygiène, Sécurité, Environnement), parfois encore méconnu du grand public, mais devenu une priorité absolue pour le monde du travail. Plus qu’un sigle, une démarche à même de créer un environnement sain et sûr, tant sur le plan humain qu’économique.
Des salarié.es concerné.es dans tous les secteurs
Chaque jour, des multitudes d’êtres humains vont et viennent, se croisent et se bousculent pour donner le meilleur d’eux-mêmes au sein de tous les secteurs professionnels (artisanat, agriculture, industrie, chantiers de BTP…), qu’ils soient publics ou privés. Au contact d’une clientèle, cachées dans des ateliers de production, concentrées sur leurs tâches dans des bureaux aménagés en open space ou flex office ou ailleurs encore, elles sont les forces vives sans lesquelles l’économie de tout pays tournerait au ralenti – comme la crise sanitaire nous l’a amplement démontré -, voire s’effondrerait. Aussi est-il essentiel de protéger toutes les personnes s’inscrivant dans cet élan productif.
Objectif prévention pour tous
En 2023, le Rapport Annuel de l’Assurance Maladie – Risques Professionnels indiquait 772 784 salarié.es affecté.es par des accidents du travail et 125 958 souffrant de maladies professionnelles en France. Un mal-être qui nécessite la mise en place d’un système de gestion assurant une meilleure sécurité pour tous.
D’autant que la loi prévention santé au travail, entrée en vigueur le 1er avril 2022, dessine une volonté jusqu’alors inédite de tisser des liens plus forts entre tous les acteurs de la prévention (Mission Handicap, employeur, RH, chargés de prévention, médecine du travail…) et le salarié.
- La création d’un passeport de prévention permet désormais de recenser l’ensemble des attestations, certificats et diplômes obtenus par le salarié dans le cadre de formations relatives à la santé et la sécurité au travail.
- Par l’effet de la réforme, le Document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP), largement étoffé notamment par un programme annuel de prévention, doit être conservé par l’entreprise, et ce quelle que soit sa taille, pendant au moins quarante ans.
Reste, dès lors, aux équipes QHSE, à mettre en place les processes les plus adaptés à leurs structures pour répondre aux besoins, aux angoisses et aux attentes de salarié.es confronté.es aux risques du métier.
TMS, chutes, lombalgies, maladies professionnelles…
Annoncée Grande cause nationale de 2025, la santé mentale est, certes, devenue une matière stratégique pour les entreprises. Mais d’autres maux, tout aussi handicapants, peuvent venir, un jour ou l’autre, frapper la santé et la sécurité de tout travailleur.
Ainsi, les TMS, ou troubles musculosquelettiques, représentent un problème de santé préoccupant touchant les articulations, les muscles et les tendons. Ces affections, qui ont des origines multiples, trouvent souvent leurs racines dans le milieu professionnel en raison de risques liés aux postures et aux manutentions. Prédominants dans le secteur de la santé humaine et de l’action sociale (SHAS), elles font le lit de plus de 90 % des maladies professionnelles déclarées.
Il y a aussi les blessures et coupures provoquées par l’utilisation de machines, les chutes de plain-pied par glissades du fait de sols souvent humides ou rendus glissants par des déchets, les risques thermiques pour des personnes travaillant sous la canicule ou dans des chambres froides, les risques chimiques souvent incontournables lors d’opérations d’entretien et de nettoyage. Et que dire du travail au voisinage de machines bruyantes, des contraintes du travail de nuit sinon évoquer, là encore, leur impact sur la santé comme l’attestent de nombreuses études scientifiques ?
Aujourd’hui, la prévention et l’amélioration des conditions de travail dans l’entreprise dépassent largement l’équipement ergonomique le plus souvent très bien adapté aux besoins de chaque collaborateur (chaise, écran, équipement de protection…).
Formation et sensibilisation : les entreprises s’engagent
Les métiers de la logistique pratiqués en entrepôt, souvent considérés comme difficiles physiquement, bénéficient de plus en plus de formations régulières pour réduire l’exposition des salarié.es aux situations professionnelles dangereuses. En 2022, Carrefour Supply Chain (SC) a signé une convention triennale avec la Cramif (Caisse Régionale d’Assurance Maladie d’Ile-de-France) portant sur l’amélioration des conditions de travail et la prévention des risques dans ses entrepôts. Cet engagement concerne l’ensemble de ses sites logistiques français et ses 8000 salarié.es.
Au sein de Chanel, autre cheval de bataille : la lutte contre la sédentarité. Ainsi, des cycles de conférences et des ateliers ont été mis en place pour sensibiliser les salarié.es à la nécessité de bouger aussi sur leur lieu de travail. De fait, la sédentarité est la porte ouverte au surpoids et à l’obésité – qui sont en forte augmentation -, aux troubles du sommeil, de la digestion et aux TMS. Avec, aussi, des animations pour les inciter l’ensemble des équipes à prendre plus souvent les escaliers et des partenariats avec des salles de sport et des mutuelles. Autre exemple, les usines du groupe LVMH organisent des séances d’échauffement à la prise de poste.
Qu’ils soient externes ou internes aux entreprises, les consultants et responsables QHSE interviennent désormais dans tous les domaines de la sécurité et de la santé au travail. Dans le BTP, la fonction de préventeur devient progressivement incontournable, notamment sur les grands chantiers industriels. Fin 2023, 26,4 % des salarié.es du groupe EDF étaient couverts par une certification santé sécurité ISO 45001 ou MASE, association avec laquelle EDF a reconduit son engagement en renouvelant une convention de partenariat pour améliorer les performances santé-sécurité du Groupe avec ses partenaires industriels.
L’entreprise, entre espoirs et résistances
Employé dans une poissonnerie, Stéphane, 45 ans, les mains constamment au contact de l’eau glacée, a déclenché un syndrome de Raynaud.
« Je bosse dans ce secteur que j’aime depuis l’âge de 16 ans, confie-t-il. Lorsque j’ai évoqué ma situation auprès de mon employeur et demandé une adaptation de mon poste, j’ai tout simplement été licencié pour inaptitude. »
Idem pour Franck, magasinier cariste de 48 ans, victime d’un accident de travail ayant entraîné un lumbago chronique.
À recueillir moult témoignages, force est de constater qu’il y a trop souvent encore les grandes entreprises et les autres. S’approprier la démarche QHSE risque, bien sûr, d’être plus délicat pour les TPE et PME qui souvent peinent à s’insérer dans une exigence d’adaptation permanente, aujourd’hui incontournable. Aussi devront-elles plus encore s’entourer. Plus précisément, avancer main dans la main avec tous les acteurs : partenaires sociaux, services de préventions et de santé au travail… afin de nouer des liens solides permettant d’agir vraiment en matière de prévention mais aussi de performance.
Opter pour la gamification QHSE au boulot
Toutes les entreprises font le même constat : la gamification (parcours digital learning, quiz interactif, serious game…) offre la possibilité de sensibiliser aux risques professionnels, et à bien d’autres thématiques, de manière ludique et immersive. Elle constitue pour les managers un moyen de vivre des expériences de manière virtuelle pour appréhender des situations bien réelles, et parfois ô combien risquées, pour l’ensemble des salarié.es.
Ainsi, la gamification a ouvert la voie à de nouvelles façons d’informer et de sensibiliser autrement qu’avec un discours formel et didactique. En quelque sorte, elle sert d’accroche, réveillant notre âme d’enfant pour aborder les sujets les plus graves par la dédramatisation.
Depuis quelques années déjà, les jeux d’évasion ont le vent en poupe. Imaginez : vous venez d’être embauché.e en qualité de stagiaire, mais votre responsable vous charge d’enquêter sur l’accident survenu à un certain Christophe ! Prix de l’innovation Préventica 2019 dans la catégorie « Conseil formation », « L’accident » est le premier escape game de prévention multirisques. D’autres, bien sûr, et pas des moindres, lui ont emboîté le pas.
Fort de son expertise en matière de gamification, DOWiNO s’inscrit pleinement dans la démarche QHSE pour proposer des solutions innovantes qui parlent au plus grand nombre. Les salarié.es d’Experis, rivalisant d’ingéniosité et de perspicacité pour obtenir le meilleur score, se sont déjà élancés sur un parcours digital learning de prévention des risques professionnels. Les équipes de Waga Energie ont, quant à elles, opté pour des modules gamifiés culture sécurité, contenant des mises en situation et des cas pratiques à résoudre.
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Les acquis sont-ils mieux intégrés avec le serious game ? Le serious game va mettre le joueur en confiance. Il se sentira plus serein lorsqu’il aura à gérer des situations qu’il a déjà rencontrées. Il permet en outre de gagner en expérience.
Esprit d’équipe, recherche de la performance, objectifs à atteindre… Qu’il se décline en groupe ou en individuel, le serious game est pour un manager l’occasion d’organiser des défis pour son équipe, de partager une culture sécurité, et une façon ludique de former à la gestion des risques professionnels. Alors, allez-vous vous laisser tenter par le jeu ?
Par Sandrine Letellier, journaliste généraliste spécialisée en santé et handicap. J’ai mené l’essentiel de ma carrière au sein de la presse grand public et travaillé de nombreuses années pour Que Choisir Santé et être, Emploi, handicap et prévention. Aujourd’hui, je collabore régulièrement à la rédaction d’enquêtes et dossiers pour plusieurs supports dont Zèbres et Cie ou encore les sites harmonie-santé.fr et Handicap.fr